Comment Natalia Vodianova et Antoine Arnault se sont Rencontrés, Sont Tombés Amoureux et Ont créé Leur Famille Moderne

 » C’est un merveilleux gâchis « , dit Natalia Vodianova en entrant dans le salon de son appartement à Paris, la Tour Eiffel se profilant par la fenêtre. Un Yamaha baby grand poli est entouré de tous les côtés par un assortiment de trucs pour enfants de couleur bonbon: des puzzles en bois, un château de Playmobil, un cheval à bascule, une caisse enregistreuse en plastique et un téléphone jouet pour les enfants. Ils se fondent dans des divertissements plus adultes, y compris une roue de roulette dans un coffre à vapeur Louis Vuitton. Sur presque toutes les surfaces, il y a des piles de livres — le partenaire de Vodianova depuis six ans et le père de ses deux plus jeunes enfants, Antoine Arnault, n’aime pas s’en débarrasser. Des romans pop comme The Maze Runner se trouvent au-dessus des manuels de poker, à côté de best-sellers pas tout à fait, comme un guide français sur le marketing pour les femmes. Il y a suffisamment de catalogues de maisons de vente aux enchères et de tomes de table basse (Yves Klein, Steve McCurry, Erwin Olaf, Alexander McQueen) pour stocker une librairie d’art – même si cela ne dérange pas les vestes anti—poussière tachées d’anneaux laissés par des biberons de lait maternisé. Là où il n’y a pas de livres, il y a des bougies en Cire Trudon de la taille d’un seau, des vases sur des vases de coquelicots et de roses roses, et des instantanés de vacances encadrés du clan Vodianova-Arnault. S’il n’y avait pas les œuvres d’art importantes dispersées dans l’appartement, il y aurait peu de choses qui suggèrent que c’est la maison de l’un des mannequins les plus réussis au monde et le fils du premier magnat du luxe en France, Bernard Arnault.

Installée sur un canapé sectionnel près du piano, Vodianova jongle avec ses enfants, remettant brièvement Roman, 1 an, à Lucas, qui a presque 16 ans, tandis que Viktor, 9 ans, s’éloigne au piano. Maxim, 3 ans, à la tête bouclée, tire sur les longs cheveux blonds blancs de sa très patiente sœur Neva, âgée de 11 ans. Vodianova a emménagé dans le duplex il y a cinq ans avec Arnault et sa tribu, qui ne comprenait alors que les trois enfants les plus âgés, engendrés par son ex-mari, Justin Portman. Assez de temps s’est écoulé pour que de petites mains aient maculé leurs empreintes digitales sur les murs pâles de l’appartement, que la succursale de Portman ait ajouté le français à leur russe et à leur anglais, et que le placard de porcelaine ait été transformé en petite pharmacie. (Ce groupe subit beaucoup de pansements.) À l’étage, le mur à côté de la chambre de Roman est rempli de mesures manuscrites retraçant les hauteurs des enfants, ainsi que celles de leur mère et de leur grand-mère, de la première épouse de Bernard Arnault, Anne Dewavrin (ici appelée « Mamoune »), et de l’amie de la famille Karlie Kloss, qui est plus grande que tout le monde, sauf Antoine. « Nous avons besoin de plus d’espace », explique Vodianova, qui aspire à au moins une pièce qui n’est pas « infestée de jouets », ajoutant: « Nous cherchons, mais je suis presque paranoïaque de laisser partir cet endroit. Nous avons été si heureux ici. »

Tranquillement beau, avec une voix grave et la réserve de son père, Arnault était sans enfant quand lui et Vodianova ont commencé à se voir en 2011, au moment où elle et Portman divorcaient. « Depuis presque notre premier rendez-vous, ce fut un superbe tour de montagnes russes », dit-il. Pour eux deux, c’était un cas de quand vous savez, vous savez, même si Arnault savait en premier.  » Natalia ne s’en souvient même pas « , se souvient-il de la première fois qu’ils se sont rencontrés, lors d’un shooting pour une campagne Louis Vuitton en 2008 (il était alors responsable de la communication de la maison). Il a présenté un casting de mannequins composé de Vodianova, Eva Herzigova, Angela Lindvall, Claudia Schiffer, Naomi Campbell et Stephanie Seymour. « Je me souviens l’avoir vue et ma mâchoire tomber en quelque sorte à l’intérieur », dit Arnault.  » Je veux dire, bien sûr qu’elle est belle, mais elle a quelque chose d’indéfinissable: son regard, son air; il y a une aura autour d’elle. »Par la suite, chaque fois qu’ils se croisaient au cours des prochaines années ou qu’ils se présentaient aux mêmes dîners de groupe, ils étaient amicaux. Finalement, après qu’Arnault eut rompu avec sa petite amie, « et j’avais lu qu’elle se séparait de son mari », dit-il, « je lui ai envoyé un texto. »Vodianova l’a retenu pendant des mois avant d’accepter de se rencontrer à son appartement, pour éviter une observation fortuite et déclencher la spéculation médiatique. « Nous avons pris un verre sur sa terrasse avec vue sur Paris », dit-elle, « et c’était complètement ridicule. Nous étions tous les deux super timides. Je savais que le voir en jean, comme un gars décontracté et normal, je l’aimais bien. Mais il n’a même pas essayé de m’embrasser! Je ne suis pas le genre de fille qui s’inquiète si un homme l’aime bien. Je veux dire, quelque part au fond, je suis vraiment fragile, et ça me ferait mal, mais j’ai fait beaucoup de bravades, même à moi-même. Alors j’ai pensé, OK, peut-être qu’il veut juste être ami? » Les textes ultérieurs l’ont désamorcée de la notion.

C’était le prochain rendez-vous, un dîner à La Société, à Saint-Germain, quand Vodianova tomba amoureux de lui. Ils ont découvert qu’ils louaient des maisons d’été à 10 minutes l’une de l’autre à Ibiza. Vodianova n’avait présenté ses enfants à personne depuis son divorce, et bien que les choses décollent entre eux, elle a invité Arnault à passer.  » Non seulement les enfants étaient là, se souvient Arnault, mais aussi ses grands-parents, sa mère et un couple qui s’occupait des enfants. À un moment donné, la femme du couple a eu une crise de panique et nous avons dû appeler une ambulance. Je savais donc dans quoi je m’embarquais. Très vite après, j’allais presque tous les week-ends en Angleterre, où elle vivait. Je lui ai dit : ‘Viens à Paris, je veux qu’on vive ensemble. » Elle a dit: « Tu réalises que ce n’est pas juste moi, n’est-ce pas? »Mais elle y a réfléchi, a négocié un peu avec son ex-mari, qui vit en Uruguay, et c’était tout. »Cet automne-là, les enfants ont commencé dans une école internationale à Paris.  » Je lui ai dit que je voulais avoir des enfants avec elle « , raconte Arnault. Cela n’a pas pris longtemps, bien que Vodianova ait d’abord hésité. « Je veux dire, j’avais déjà trois enfants magnifiques », se souvient-elle. « Peut-être qu’au départ, je le faisais plus pour lui que pour moi, mais, en même temps, quand on est amoureux d’un homme, on veut le reproduire autant de fois que possible. »Maxim est venu deux ans plus tard, et deux ans après, Roman est né.

« Passer de zéro à cinq enfants en deux ans et demi est la chose la plus merveilleuse au monde », dit Arnault. « Non seulement avoir les nôtres, mais aussi ses enfants. Natalia est beaucoup plus mature en tant que mère qu’elle ne l’était lorsqu’elle a eu ses premiers bébés. Et c’est un peu égoïste, mais les plus âgés sont d’une grande aide avec les plus petits! »À peu près au même moment où sa nouvelle famille est arrivée, Arnault a assumé le rôle de PDG de la marque de vêtements pour hommes Berluti et, six mois avant la naissance de Maxim, il a pris le poste de président de la société italienne de cachemire Loro Piana. Les changements domestiques et professionnels se sont mutuellement soutenus, dit-il, faisant de lui un meilleur communicateur.

Ceux d’entre nous qui ont de longs souvenirs de mode pourraient encore avoir du mal à réconcilier la Vodianova de 17 ans, dont la sensualité était si couvante de nymphettes qu’elle était presque troublante, avec la femme de 35 ans qu’elle est aujourd’hui. Mais même maintenant, sur les photos, Vodianova peut encore s’attarder dans ce même espace indéterminé entre l’enfance et la féminité. Lorsque le photographe Patrick Demarchelier alignait un cliché avec Vodianova et ses enfants pour cette histoire, elle a ordonné avec autorité, en russe, que sa couvée s’installe. Une seconde plus tard, elle sourit et tourna la tête vers Demarchelier, établissant un contact visuel limpide avec la caméra, jetant son sort.

La trame de fond bien connue de Vodianova, qu’elle n’est ni cachée ni romancée, rend l’innocence emmêlée qu’elle apporte à une image particulièrement convaincante. Élevée par une mère célibataire, elle a grandi pauvre dans la ville soviétique de Gorki, aujourd’hui Nijni Novgorod, s’occupant de sa petite sœur handicapée, Oksana, atteinte de paralysie cérébrale, et vendant des fruits avec sa mère à l’âge de 11 ans. Sa grand-mère, une ouvrière d’usine à la retraite qui aimait « nager avec des ours polaires » dans des eaux glacées, lui a donné une certaine stabilité et un certain confort — ainsi qu’un sens du style. « Elle avait les cheveux roux qu’elle avait mis dans un chignon des années 1940 et portait du rouge à lèvres rouge tous les matins », se souvient Vodianova. À 17 ans, Vodianova a été repérée — « Si je n’étais pas devenue mannequin, j’aurais probablement fini par vivre dans la rue », dit—elle – et est allée à Paris, où elle s’est élevée si précipitamment qu’elle a gagné le surnom de Supernova. À 19 ans, déjà star des podiums et des couvertures et tout juste mariée à Portman, elle a donné naissance à Lucas, ce qui a amené les initiés de la mode à se demander si, compte tenu de l’immense richesse de la famille immobilière de son mari, elle pourrait bien prendre sa retraite.

La réponse est venue six semaines après l’accouchement de Vodianova, lorsqu’elle a ouvert le défilé Yves Saint Laurent. « Je n’avais pas encore été occidentalisée quand je suis tombée follement amoureuse et que je suis tombée enceinte », se souvient-elle. « D’où je viens, c’était normal d’avoir un bébé à 19 ans. Peut-être que la plupart des filles occidentales élevées dans une famille forte pour elles diraient: « Tu es très précieuse, es-tu sûre de ce gars? »Personne ne m’a dit que j’étais précieuse en ce sens, alors l’amour, pour moi, était cette chose précieuse. C’était tout à fait logique pour moi. Est-ce que je recommanderais la même chose à ma fille aujourd’hui? Absolument pas. »Même maintenant, malgré toutes ses réalisations professionnelles et personnelles, elle reste  » vigilante », dit-elle. « Je ne me sens jamais en sécurité. Je suis toujours prêt au pire ! »

La famille immédiate de Vodianova n’a peut-être pas été en mesure de lui donner beaucoup de choses matériellement, mais ils lui ont certainement donné un sens du but. Son éthique de travail réputée solide reste intacte, même si ses priorités ont changé. Elle consacre environ un mois par an au travail éditorial et à l’exécution de contrats pour Calvin Klein et Guerlain. En dehors de cela, elle passe ses journées — jusqu’à 16 heures., quand les enfants rentrent à la maison — à la succursale parisienne de la Fondation Naked Heart, située dans un immense immeuble de bureaux moderne à quelques pâtés de maisons de son appartement. (Il y a aussi des bureaux à Londres et en Russie.) Bien que la fondation, créée par Vodianova en 2004, organise chaque année deux galas glamour, le Love Ball et la Fabulous Fund Fair, et participe à plusieurs autres événements annuels d’art et de mode, au bureau, son look n’est pas maquillé, son jean en détresse et ses bottes de combat Louis Vuitton. Sa grand-mère, qui lui donne toujours des conseils de beauté, n’approuverait probablement pas.

Naked Heart a vu le jour après qu’un siège dans une école primaire de Beslan, en Ossétie du Nord, par des séparatistes tchétchènes en 2004 a poussé Vodianova à faire quelque chose pour son pays. Son idée était de construire des terrains de jeux dans des zones difficiles en Russie, adaptés aux enfants ayant des besoins spéciaux comme sa sœur. Vodianova explique qu’il y a un grave manque de soutien institutionnel et social en Russie, ce qui conduit de nombreuses familles à placer des enfants atteints d’autisme, de syndrome de Down ou de paralysie cérébrale dans des orphelinats gérés par l’État. « Ma mère a gardé Oksana dans la famille, ce qui était une exception, et j’ai vu à quel point il était difficile pour elle de l’élever », dit-elle. À ce jour, Naked Heart a construit 177 terrains de jeux en Russie, au Royaume-Uni et au Pérou, avec au moins 17 autres approuvés pour 2017.

Huit ans après la naissance de Naked Heart,  » nous construisions autant que possible en Russie et voulions un plus grand défi « , explique Vodianova. En réunissant un groupe d’experts, la fondation a conçu un centre de soutien familial modèle pour les personnes ayant des besoins spéciaux, qui a ouvert ses portes à Nijni Novgorod en 2011 et auquel Oksana assiste. Ensuite, Naked Heart a développé un programme mobile de formation des enseignants pour les enfants autistes, axé sur l’intervention précoce, qui est maintenant actif dans 10 écoles et 24 écoles maternelles en Russie. Depuis 2012, la fondation organise une table ronde éducative annuelle en Russie et fait des dons à d’autres ONG ayant des missions complémentaires. En 2015, Vodianova est devenue membre du conseil d’administration des Jeux Olympiques spéciaux, et elle n’hésite pas à utiliser sa renommée pour essayer de changer la conversation culturellement. Lorsque la pop star russe Dima Bilan lui a demandé d’apparaître dans l’une de ses vidéos, elle a accepté à condition qu’il la laisse écrire le scénario. « Ne Molci », qui se traduit par « Ne te tais pas », est une histoire de Cendrillon sur une femme sûre de ne pas trouver l’amour à cause du syndrome de Down de sa fille. La vidéo, dans laquelle Vodianova fait une apparition, a eu plus de 7 millions de vues sur YouTube.

L’obsession actuelle de Vodianova est Elbi, l’application de réseau social de micro-dons qu’elle a développée il y a deux ans avec son conseiller média, Timon Afinsky, qui est actuellement en version bêta et relancera après les tests. Elbi encourage les utilisateurs à partager des illustrations et des photos originales pour envoyer des messages de soutien aux enfants dans le besoin; chaque fois que d’autres utilisateurs aiment votre contenu, ils font un don de 1 $ — le montant maximum autorisé — à l’organisme de bienfaisance lié. « Nous voulons rendre le don facile, quelque chose que vous pouvez faire assis à l’aéroport, sans réfléchir », explique Vodianova. Elle a déjà participé à plusieurs conférences philanthropiques internationales, et elle compte multiplier ces apparitions. (Elle vient de signer avec l’agence Kruger Cowne, qui représente également Sir Bob Geldof, l’archevêque Desmond Tutu et Elle Macpherson, pour l’aider à « prendre des décisions plus éclairées » sur la façon d’avoir un impact plus important.) En tant qu’orateur public, Vodianova est sincère et emphatique. À l’avenir, il est plus probable que nous la verrons arpenter une scène avec un micro au casque plutôt que de marcher sur la piste. Quoi qu’il en soit, il sera extrêmement difficile de ne pas lui accorder toute notre attention.

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